Commençons par poser la bande dessinée dans son contexte. Quelque part dans l’est de la France au milieu des années 90, dans un paysage social dévasté (fermetures d’usines et déshérences en tout genre), Kamel, séducteur invétéré auquel aucune femme ne sait résister, entretient une liaison avec l’épouse d’un leadeur d’extrême droite. Hélas, le couple adultère est démasqué. La fureur meurtrière du mari trompé contraint le Don Juan, dans l’urgence absolue, à une cavale improvisée. Kamel s’enfuit vers le sud, flanqué du jeune Alexandre, un adolescent un peu complexé qui l’admire pour ses conquêtes.
Une traque fantastique s’engage, haletante, au fil de laquelle Baru, légendaire figure de la bande dessinée, est inspiré comme jamais et brosse un subtil et saisissant portrait d’une France en crise et en proie à ses démons intimes.
Mon appréciation d’une bande dessinée culte
Narration coup-de-poing, énergie graphique peu commune, personnages fouillés et remarquable finesse d’observation : L’Autoroute du soleil (récompensé par le Prix du Meilleur Album au Festival d’Angoulême en 1996) peut être à juste titre tenue pour l’une des plus grandes bandes dessinées françaises. Plus de 400 planches de bonheur intégral, à redécouvrir à travers cette nouvelle édition.
Car Baru assume la paternité de 16 oeuvres engagées. Faites le calcul : Première bande dessinée publiée il y a 28 ans, il a depuis réalisé une dizaine de one-shot, pas plus de 2 ou 3 collaborations (pauvres Zhéros et Les Chemins de l’Amérique à minima), cela représente un peu moins de deux années entre chaque album ! Ses lecteurs apprécient son style mordant, ses récits qui mettent « les pieds dans la merde » dira-t-il dans une interview. Ils sont « tous marqués par un fort ancrage dans la réalité sociale (…) et empreints d’un humanisme combattif » (propos extraits de son site).
Au final, on obtient avec l’Autoroute du Soleil, un chef d’oeuvre du maitre de la bande dessinée française.